Retour de Syrie

Le 20 mai 2024, cinq membres de l’association Les Amis de Mar Moussa Suisse ont entrepris leur voyage vers la Syrie. Destination Beyrouth, puis en taxi jusqu’ au couvent des Jésuites à Tanaïel, à la frontière syrienne. Nous avons ensuite pris un taxi syrien, pour traverser la frontière et prendre la route menant à Nebek, en contournant Damas.

Nous avons constaté que Douma et des quartiers extérieurs de Damas sont toujours en ruine, mais çà et là des industries se sont implantées. Nous avons aussi observé que par rapport à l’année précédente, les panneaux solaires se sont multipliés sur tous les toits. Une manière de pallier au prix du pétrole et aux coupures d’électricité.

Dès le lendemain de notre arrivée à Mar Moussa, nous avons assisté à la fête de fin d’année du jardin d’enfants de la petite ville de Nebek, à une dizaine de km du monastère, une école enfantine que notre association soutient depuis des années. Enfants endimanchés, parents fiers, institutrices créatives. Moment émouvante : des enfants ont porté le drapeau palestinien et tous ont chanté pour les enfants de Gaza. Nous avons aussi visité l’extension du jardin d’enfants, qui avance bien. Et l’école de musique où les jeunes musiciens ont fait une démonstration de leur progrès sur des instruments orientaux et occidentaux, en présence de leurs professeurs qui viennent chaque vendredi de Damas.
Au monastère, les progrès sont visibles eux aussi : plantation de vignes, d’oliviers et de figuiers sur des terrains arides enrichis de terre arable, nouvelles portes et fenêtres bien isolées. Oui, notre argent est bien utilisé. Y vivent actuellement Jihad, le prieur, Houda, Yossi, Joseph, et Loris un jeune mécanicien de Genève. Et cet été tous les membres de la communauté ont afflué vers Mar Moussa pour partager le travail (écrasant) et l’accueil (de visiteurs de plus en plus nombreux).
Nous avons visité à Homs notre ami Jacques Mourad, nouvel archevêque, qui travaille au redressement de la paroisse et la stimule. Il nous a accueillis dans la grande tradition de l’hospitalité syrienne. Homs se relève petit à petit des années de guerre dévastatrices, mais les stigmates sont encore visibles partout. Cependant le souk a rouvert, et des immeubles reconstruits.
Entre Hama et Alep, des ruines longent la route de chaque côté. A Alep, nous avons logé dans un nouvel hôtel du centre, les rues sont animées. Les restaurants pleins. Les gens ne se promènent plus avec un portemonnaie… mais avec des sacs plastiques noirs qui renferment des liasses, l’inflation est en effet terrifiante, l’an dernier, au change, il fallait 2000 livres syriennes pour l’équivalent de un franc, aujourd’hui 12.000 l.s. ! On paie 60.000 livres pour un repas au restaurant… Et ni les retraites ni les salaires n’ont augmenté. Inutile de dire que la vie quotidienne est très difficile. Le besoin d’aide est criant non seulement pour la vie quotidienne mais pour restaurer les immeubles endommagés par la guerre et dernièrement par le tremblement de terre de février 2023.
Le célèbre souk d’Alep et ses 13 km de galeries est réduit à des décombres. Seuls quelques centaines de mètres ont été restaurés- plutôt bien – grâce à l’aide des Ismaéliens de la Fondation Aga Khan.


Quelques signes de résilience cependant: des jeunes investissent dans la restauration des échoppes et créent des cafés, des ateliers. Soumaya Hallak , cantatrice syrio-suisse, a créé dans le quartier arménien un centre d’art qui reçoit femmes et enfants pour des initiations à la méditation, à la relaxation, au chant. Pendant les périodes d’examens du baccalauréat, le gouvernement syrien et l’enclave dissidente islamiste d’Idlib se sont mis d’accord pour que des collégiens d’Idlib viennent à Alep pour passer leurs examens. Des lueurs d’espoir ?